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Zoom sur les 5 sens du chien : La vue


La vision canine diffère nettement de celle des humains.


Adaptée à un mode de vie axé sur la détection du mouvement, la chasse et la vigilance, elle repose sur des caractéristiques anatomiques et fonctionnelles spécifiques. Cet article examine six aspects essentiels de la vue du chien :


  1. L’anatomie de l’œil canin

  2. La vision des couleurs

  3. La captation du mouvement

  4. Le champ visuel et la vision tridimensionnelle

  5. La vision de loin et de près

  6. Les implications éthologiques et comportementales



1. Anatomie de l’œil du chien


L’œil du chien présente plusieurs adaptations remarquables qui reflètent son histoire évolutive et ses besoins comportementaux :


  • Rétine et photorécepteurs :

    La rétine canine est fortement dominée par les bâtonnets, les cellules photoréceptrices sensibles à la lumière, ce qui confère une excellente vision en conditions de faible luminosité. Les cônes, responsables de la vision des couleurs et de la perception des détails par forte luminosité, sont en nombre réduit par rapport aux humains. Ainsi, la sensibilité lumineuse est privilégiée au détriment d’une acuité chromatique fine.


  • Tapetum Lucidum :

    Les chiens disposent d’un tapetum lucidum, une couche réfléchissante située derrière la rétine qui renvoie la lumière non absorbée vers les photorécepteurs. Ce mécanisme améliore la vision nocturne et amplifie les signaux visuels dans des environnements faiblement éclairés, atout majeur pour un animal nocturne ou crépusculaire.


  • Structure de l’œil et densité cellulaire :

    L’anatomie oculaire du chien, avec un globe oculaire légèrement plus rond et des nerfs optiques organisés différemment, contribue à une perception du mouvement particulièrement sensible. Des études histologiques montrent que la densité des photorécepteurs et leur distribution varient selon les races, influençant ainsi les capacités visuelles individuelles.


  • La fovéa :

    Contrairement aux humains, les chiens n'ont pas de fovéa.

    La fovéa centrale est une petite dépression située au centre de la macula (zone centrale de la rétine, où convergent les rayons lumineux). Cette région est caractérisée par une densité élevée de cônes, permettant une résolution très élevée et la capacité de distinguer des détails fins. Contrairement aux zones périphériques de la rétine, la fovéa contient très peu de bâtonnets, ce qui limite la sensibilité à la lumière faible mais optimise la clarté et la précision de la vision en lumière vive.

    La rétine du chien n'est pas organisée comme celle de l'humain, la répartition des photorécepteurs est plus étendue, ce qui lui confère un large champ visuel et une excellente détection des mouvements, au détriment d’une vision centrale très nette.


2. Vision des couleurs


La perception des couleurs chez le chien est fondamentalement différente de celle des humains :


  • Dichromatie :

    Les chiens possèdent deux types de cônes, sensibles principalement aux longueurs d’onde bleues et jaunes, contrairement aux humains qui en ont trois (vision trichromatique). En conséquence, le rouge et le vert apparaissent sous forme de nuances atténuées ou de gris. Cette limitation n’est pas un handicap, car le système visuel canin privilégie le contraste et la détection de mouvements, essentiels à leurs activités quotidiennes.


  • Adaptation fonctionnelle :

    La vision dichromatique est particulièrement efficace dans un environnement naturel, où le contraste entre le ciel et la végétation (souvent perçus en bleu et en jaune) permet de distinguer rapidement des objets en mouvement ou des formes importantes pour la survie, comme des proies ou des prédateurs.



3. Captation du mouvement


La capacité à percevoir des mouvements rapides est un atout majeur pour le chien, qui joue un rôle crucial dans la chasse et la vigilance :


  • Fréquence de Fusion Critique (FFC) :

    La FFC correspond à la fréquence à partir de laquelle une succession d’images est perçue comme un mouvement continu. Chez les chiens, cette fréquence est généralement supérieure à celle des humains – certains travaux suggèrent des valeurs entre 70 et 80 Hz pour les chiens, contre environ 50 à 60 Hz pour l’humain .


  • Détection et réaction :

    Cette sensibilité accrue leur permet de capter de très rapides mouvements dans leur champ de vision, facilitant ainsi la poursuite d’une proie ou l’évitement d’un danger. La capacité à réagir rapidement aux changements visuels contribue également à une meilleure coordination œil-mouvement.




4. Champs de vision et vision tridimensionnelle


L’organisation oculaire des chiens offre un large champ de vision mais avec une vision stéréoscopique limitée :


  • Champ visuel étendu :

    Placés sur les côtés de la tête, les yeux des chiens leur confèrent un champ visuel pouvant atteindre 250° à 270°, ce qui est bien supérieur aux 180° moyens chez l’humain. Ce large champ leur permet de surveiller leur environnement de manière quasi panoramique, détectant des mouvements dans leur périphérie qui pourraient échapper à une vision plus centrée .


  • Vision tridimensionnelle et binoculaire :

    La vision stéréoscopique repose sur l'intersection des champs visuels des deux yeux. Chez le chien, l'angle de recouvrement binoculaire est réduit (environ 40° à 60°) par rapport à celui des humains (environ 120°). Cela limite leur perception de la profondeur, bien que les chiens compensent par d’autres indices visuels et sensoriels (comme l’odorat et la perception du mouvement) pour appréhender la distance et la tridimensionnalité de leur environnement.





5. Vision de loin et de près


Les capacités d’accommodation varient considérablement chez le chien, influençant la perception des objets à différentes distances :


  • Vision de loin :

    Bien que les chiens puissent détecter des objets à grande distance grâce à leur large champ visuel, leur acuité pour distinguer des détails fins est inférieure à celle des humains. Cela signifie qu’à distance, ils perçoivent mieux les formes générales et les mouvements plutôt que les détails complexes.


  • Vision de près :

    La capacité d’accommodation des chiens est limitée : leur point de vision nette se situe généralement entre 40 et 60 cm. Cette limitation rend difficile la lecture de détails ou l’identification précise d’objets très proches, ce qui explique pourquoi ils se fient souvent à d’autres sens, en particulier l’odorat, lors des interactions rapprochées.





6. Implications éthologiques et comportementales


Les différences visuelles entre chiens et humains ont des répercussions importantes sur leur comportement et leur adaptation à l’environnement :


  • Adaptation à l’activité nocturne et à la chasse :

    La forte prédominance des bâtonnets et le tapetum lucidum permettent aux chiens d’être actifs dans des conditions de faible luminosité. Cette capacité est essentielle pour des activités telles que la chasse, où la vision doit être efficace malgré l’obscurité.


  • Détection du mouvement accrue :

    Une FFC élevée et un champ visuel étendu facilitent la détection rapide des mouvements, un aspect crucial pour identifier les menaces ou repérer une proie. Ainsi, les chiens réagissent plus efficacement aux stimuli dynamiques, même dans un environnement complexe.


  • Utilisation complémentaire des sens :

    La limitation de la vision des couleurs et de la capacité d’accommodation de près conduit le chien à compenser par d’autres sens, notamment l’odorat. Cette intégration sensorielle permet une perception du monde holistique, où la vue, l’odorat et l’ouïe interagissent pour guider le comportement social et la prise de décision.


  • Communication sociale et reconnaissance :

    Bien que l’odorat reste le sens dominant pour la communication entre chiens, la vision joue également un rôle dans la reconnaissance des postures, des mouvements et des expressions faciales. La vision périphérique étendue aide à capter ces signaux sociaux, même si les détails sont moins nets que chez l’humain.




Sources

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  • Graham, L., Wells, D. L., & Hepper, P. G. (2005). The influence of visual stimulation on the behaviour of dogs housed in a rescue shelter. Animal Welfare, 142, 143-148.


  • Horowitz, A. (2009). Inside of a Dog: What Dogs See, Smell, and Know. Scribner.


  • Kaufman P. Accommodation and presbyopia: Neuromuscular and biophysical aspects. In: Hart WM, ed. Adler's Physiology of the Eye: Clinical Application. 9th ed. St Louis, Mosby Year-Book Inc, 1992, pp 391-411.


  • Lesiuk, T. P., & Braekevelt, C. R. (1983). Fine structure of the canine tapetum lucidum. Journal of Anatomy, 136(Pt 1), 157.


  • Lind, O., Milton, I., Andersson, E., Jensen, P., & Roth, L. S. (2017). High visual acuity revealed in dogs. PLoS One, 1212, e0188557.


  • Miller, P. E., & Murphy, C. J. (1995). The Dog: Its Behavior, Nutrition, and Health. Williams & Wilkins.


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  • Neitz, J., Geist, T., & Jacobs, G. H. (1989). Color vision in the dog. Visual neuroscience, 32, 119-125.

 
 

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